10/01/2008

le monde comme un chewing gum

tout ça pour dire que le monde n'est peut-être somme toute qu'une perception molle, une coquille souple qui englobe l'individu. ensuite, chacun en fait ce qu'il veut. ou, disons, peut. en fin de compte.
je prends v, tenez. v a cette capacité inouïe à imposer son humeur aux pièces qu'elle traverse. le monde selon v n'a pas beaucoup changé, en fait, depuis les quatre barreaux qui marquaient son terrain de jeu. un gosse, il s'en fout du monde autour. en même temps ça le fascine, sa curiosité attisée chaque nouvelle seconde par les merveilles qui passent devant ses yeux, ses mains ou sa bouche, à commencer par sgros orteil. ou la lumière du soleil sur le mur. mais ce n'est pas la question.
un gamin, qu'on lui mette de la musique, qu'on lui explique que le monde est vaste et beau, qu'il y a des millions de galaxie qui nous font sournoisement prendre conscience de la petitesse de notre existence au regard de l'univers rien qu'en levant la tête la nuit, qu'on lui dise que le temps n'existe que sous la forme d'une boucle sans début ni fin, il s'en fout, essayez. lui ce qu'il fait c'est prendre son humeur pour argent comptant, et autour de lui l'univers se colore dans la seconde des mêmes reflets que son âme. attendez, le gosse, quand il boude, mais c'est la terre entière qui est maussade. 6 milliards de boudins. tout ça grâce à lui.
v, c'est un peu pareil. quand elle a le blues, vous aurez beau mettre daft punk à fond, vous aurez beau convoquer le soleil, vous aurez beau la faire danser au milieu de ces meubles splendides qui honorent son appartement de paris 5ème, bref vous aurez beau avoir beau, rien. elle a le blues, et tout à coup daft punk devient ridicule, inconsistant ou pire, déplacé, le soleil par la fenêtre ouverte ou siffle le merle joyeux devient fadasse, le merle la boucle et même les meubles, sous l'envie soudaine de se faire discrets, enfoncent un peu les murs en silence. la courbe de lumière qui fait qu'on voit le monde autour de v s'altère, et tout est saisi dans l'instant d'une torsion misérable digne d'un mal de bide.
elle est assez fascinante pour ça. j'ai bien essayé de ne pas rentrer dans son jeu. c'ets vrai que c'est agaçant à la fin, cette façon d'imposer d'une moue son mal-être à l'univers. j'ai vu des étoiles pâlir, indisposées par un coup de calgon de v. tenez-vous bien.
mais que voulez-vous, comment ne pas fondre devant ce visage soudain redevenu enfant sur ce corps long et doux. un corps adulte, trente ans d'expérience du blues, de la rupture, du grand méchant mâle, de la colère qui d'un geste foudroie les assiettes. il y a autour de nous des v qui s'autorisent à bousculer le monde plutôt que l'inverse. elles le font, le forgent, le tordent à volonté parce que c'est certainement pas à elles de se mettre au diapason du monde mais bien à lui de les respecter et de fermer sa gueule quand elles le lui demandent, nom d'un chien. et puis quoi encore.
j'ai du mal à me dire que v n'a pas raison. en dehors du fait qu'elle est impensablement belle quand elle fait la tête, mis à part cette présence intolérable qui rafle tout, la présence massive, invincible, quelque chose de nécessaire, d'obligatoire qui s'impose de façon inattendue, bousculante, et pour dire le vrai, bouleversante de la part d'un assemblage si charnel de courbes sans mot, d'os judicieux et de viscères palpitantes et fonctionnelles (j'aurais volontiers résumé tout ça à "un corps de femme" si j'avais eu l'intime certitude que cela aurait convenablement exprimé toute la splendeur que j'essaie d'évoquer), enfin bref mis à part ces détails poignants, le simple fait qu'un corps animé d'émotions impose au monde, aux meubles et à la course de l'univers la loi définie entre le crâne et le périnée, me ravit à la cause. moi je me retrouve comme un meuble incapable, spectateur sidéré de la beauté magnanime de v.
tout ça pour dire que le monde n'est peut-être somme toute qu'une perception molle, une coquille souple qui englobe l'individu. ensuite, chacun en fait ce qu'il veut. ou, disons, peut.

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